LES NOUVELLES REAC’
Depuis quelques temps, nombre de filles que je croise, entament la course au mariage. Ne vous méprenez pas, je ne parle pas de la fiancée survoltée qui s’angoisse à l’idée que le traiteur soit nul, les chaises bancales, les fleurs fanées. Non je parle de la fille qui veut qu’on la demande en mariage et un peu plus vite que ça, s’il vous plait. Elle en a assez de présenter son compagnon, son conjoint, son amoureux. Non, elle veut annoncer haut et fort « Voici mon mari » aux nouveaux amis, aux relations professionnelles, à ses cousines.
Cela démarre plus jeune que je ne me l’imaginais, 24 ans, 25 ans. Moi, bêtement je voyais ça arriver vers la trentaine, le chiffre trois entraînait un désir d’enfant et donc d’union.
Le syndrome est devenu plus puissant et frappe plus tôt visiblement. Ces “courseuses” ont ajouté une nouvelle corde à leur arc. Qu’auraient-elles pu inventer : droguer le fiancé pour le mener devant Monsieur le Maire, rédiger un contrat chez le notaire signifiant que le futur époux pourra partir librement quand bon lui semble, accepter la polygamie, lui signifier qu’elles n’ont plus que quelques mois à vivre. Pensez donc ! Ces aventurières ont repris une bonne vieille recette de grand-mère : la virginité. C’est bien connu tout ce recycle. Enfin entendons-nous bien, la plus part ne sont plus vierges depuis belle lurette, les choses du sexe ne les effarouchent guère, parfois même elles ont été savantes sur le sujet et ne rechignaient pas à séduire en se servant de leurs atouts. Mais un beau matin, elles décident de ne plus coucher avec leur compagnon car “c’est l’homme de leur vie “, une révélation s’est faite, et qu’elles veulent se réserver jusqu’au mariage. Alors adieu câlins, gâteries, coucheries. Pour porter une robe blanche le grand jour, les demoiselles veulent se racheter une vertu. Et peut-être forcer un peu la main de leur amoureux.
Ne plus coucher, nouvelle forme d’ultimatum ?
Etonnée par ce revirement soudain qui remet en cause toutes mes croyances sexuelles, je les interrogeais. Pourquoi le sexe serait-il l’ennemi du mariage ? Quel rapport entre le mariage et l’abstinence ?
Mais si les questions sont claires, les réponses restent floues. Le masque du romantisme vient souvent à leur rescousse.
« Nous voulons nous préserver jusqu’au mariage, je sais que c’est mon mari alors je veux faire les choses bien », me disait Bénédicte, jeune cadre employée à Levallois.
Si on pousse un peu plus l’interrogatoire, on découvre que le sexe est la cause, dans leur esprit, de l’échec de leurs relations précédentes. J’ai couché, on m’a quitté. Les notions de sexe et de respect deviennent alors antinomiques. Si je couche on ne me respectera pas. Le sexe n’est plus une envie mais la récompense accordée à l’homme pour le remercier de la bague au doigt.
Au-delà de la stupeur première de renoncer à une intimité sensuelle, qui est bien souvent reconnue comme le ciment voir le baromètre d’un couple, je me suis surprise à en vouloir à ces jeunes donzelles qui d’un coup enfoncent le clou du cliché de la corde au cou. Elles ne nous laissent pas le choix que d’être maman ou geishas.
Si on peut comprendre la volonté d’une jeune fille à vouloir ne coucher qu’avec son mari pour des idéaux religieux, il est nettement plus hypocrite de cesser de coucher pour se faire épouser plus rapidement. Qu’est ce qui motive ces demoiselles, issues de la libération de la femme, élevées avec l’idée de l’égalité entre les sexes, d’aller vers un chantage si rabaissant ? Au début du Vingt et unième siècle, le mariage reste-t-il un but en soi, alors même que les divorces deviennent l’avenir de plus de la moitié des couples ?
Et l’homme dans tout ça, accepte-t-il de se plier à ce jeu ? Eh bien pour ceux que j’ai rencontré, oui. Ils acquiescent en silence. Terrorisés par l’idée que s’ils émettaient une objection, leur petite amie leur cracherait au visage l’insulte suprême « Je ne suis pour toi qu’un objet sexuel ». Il est assez ironique de voir comment des arguments féministes peuvent servir la cause de ces nouvelles réactionnaires.
Alors plutôt que gronder ces jeunes femmes, qui savent parfaitement se donner ou se refuser selon la circonstance, je vais me retourner vers les hommes pour les exhorter à se révolter contre ce genre de pratique. Bannissez les arguments de l’abstinence, si votre compagne vous aime, elle ne peut résister à l’envie qu’elle a de vous. Et si elle ne vous désire plus l’épouser est une assez mauvaise idée.